Gestion de l'occlusion en développement

Publié par Jeffrey A. Dean le

Par Jeffrey A. Dean

Un article de Jeffrey A. Dean, Tiré de McDonald and Avery's Dentistry for the Child and Adolescent (10e édition), 2016.

Le dentiste généraliste se doit d’avoir un œil aguerri en matière de dépistage des malocclusions en dentition mixte. Et au-delà du dépistage, le maintien des espaces de Nance avec un arc lingual ainsi que la gestion de l’espace par meulage sélectif ou par extractions contrôlées peuvent être opportuns dans le traitement de plusieurs cas cliniques. 

L’article suivant sur la gestion de l’occlusion en développement par Jeffrey A. Dean expose d’ailleurs avec justesse l’approche à privilégier selon le modèle de développement de la dentition des patients. Bonne lecture! 


Introduction

Pour un enfant de 10 à 12 ans, l'évaluation radiographique des arcades dentaires est particulièrement importante afin de guider l'éruption, en fonction des modèles de résorption des dents primaires, de la séquence d'éruption, des ajustements des molaires pour obtenir des relations de classe I et de l'utilisation de l'espace de Nance. 

Comme la canine inférieure et la première prémolaire éruptent souvent presque simultanément, et puisqu’elles sont plus larges que leurs prédécesseurs primaires, elles prennent souvent un chemin d'éruption mésial peu souhaitable, la canine chevauchant alors les incisives latérales. Pour minimiser ce type de malposition, l'élimination contrôlée de la surface mésiale de la deuxième molaire primaire peut fournir jusqu'à 2 à 3 mm d'espace pour leur positionnement distal (Fig. 1). 

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Figure 1. L’élimination de la surface mésiale de la deuxième molaire primaire peut fournir jusqu’à 2 à 3 mm d’espace pour le positionnement distal de la première prémolaire.

Les deuxièmes prémolaires éruptent généralement environ un an plus tard, empruntant fréquemment un chemin d'éruption le long de la racine distale de la deuxième molaire primaire. L'extraction, au moment opportun, de la deuxième molaire primaire est parfois indiquée afin de permettre une éruption plus distale de la deuxième prémolaire si un tel schéma atypique est observé. En plus d'évaluer l'éruption des deuxièmes prémolaires, le clinicien doit envisager la mise en place d'un arc de maintien lingual en même temps que l'extraction ou l'exfoliation des deuxièmes molaires primaires (Fig. 2).

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Figure 2. Présence de l’arc lingual précédant l’exérèse des dents no 75 et no 85. Le meulage de la portion mésiale des secondes molaires primaires aurait été préférable lors de l’éruption des premières prémolaires afin de permettre un meilleur alignement du segment 34 à 44.

Si l'espace disponible dans le segment antérieur est restreint, ou si l'utilisation optimale de l'espace de Nance pour résoudre l'encombrement est souhaitable, et/ou si les deuxièmes molaires permanentes éruptent avant les deuxièmes prémolaires, l'arc lingual peut être un élément critique dans le contrôle des dimensions de l'arcade.

Les enfants avec des arcs linguaux ont montré une diminution moyenne de l'encombrement antérieur inférieur de 3 à 4 mm au moment de l'éruption de la deuxième molaire permanente.

Des articles basés sur le traitement ont documenté les effets positifs de l'alignement dans l'utilisation d'arcs de maintien lingual passifs pour le contrôle de l'espace de Nance lorsqu'ils sont utilisés en dentition mixte tardive. DeBaets et Chiarini1 ont rapporté l'évolution de l'arcade de 39 cas de dentition mixte présentant un encombrement antérieur inférieur et traités par une thérapie d'arcade linguale passive et l'extraction sélective de molaires primaires sur une période de 4 ans, en comparaison avec l'évolution de l'arcade chez un groupe de 60 enfants non traités présentant un encombrement similaire. Chez les enfants non traités, un déplacement mésial des canines et prémolaires inférieures s'est produit, avec un chevauchement des incisives inférieures déjà encombrées. En revanche, les enfants avec des arcs linguaux ont montré une diminution moyenne de l'encombrement antérieur inférieur de 3 à 4 mm au moment de l'éruption de la deuxième molaire permanente. Les canines et prémolaires permanentes ont érupté avec un positionnement distal supérieur de 1,5 mm par côté en moyenne chez les enfants avec des arcades linguales comparativement aux données recueillies auprès des enfants témoins. 

Dugoni et ses collaborateurs2 ont publié des résultats similaires chez 25 patients présentant une dentition mixte, avec une réduction de l'encombrement des incisives inférieures de plus de 3 mm après la mise en place d'arcs linguaux passifs et l'extraction de certaines molaires primaires. Après une période de suivi moyenne de 10 ans, 19 des 25 patients présentaient toujours un alignement antérieur inférieur cliniquement satisfaisant. Comparativement aux études de suivi sur 10 ans de patients ayant bénéficié d'alignement orthodontique, ces résultats suggèrent que la stabilité de l'alignement avec la thérapie par arc lingual était supérieure ou au moins égale à celle des traitements orthodontiques actifs. 

Reballato et al3, à l'aide de céphalogrammes, de modèles d'étude et de tomographies du corps mandibulaire, ont rapporté des changements dimensionnels chez 14 patients à dentition mixte présentant un encombrement incisif de 3 mm ou plus et traités avec des arcs linguaux passifs, comparativement aux données recueillies auprès des 16 individus témoins non traités. Chez les patients avec arc lingual, la longueur de l'arc n'a pas changé de façon mesurable pendant l'éruption des dents successives, alors que la longueur de l'arc a diminué en moyenne de 2,5 mm par côté chez les individus témoins non traités. Les changements de longueur de l'arcade étaient liés à l'avancée des premières molaires de +1,7 mm dans le groupe témoin, comparativement à seulement +0,3 mm pour le groupe de l'arc lingual.

Parallèlement, les incisives ont légèrement basculé vers l'avant dans le groupe de l'arc lingual (+0,4 mm), alors que le redressement des incisives chez les témoins a réduit la longueur de l'arc de 0,65 mm. En résumé, l'arc lingual a réduit la migration des molaires vers le mésial et le mouvement lingual des incisives en contrôlant la longueur de l'arcade, avec un soulagement simultané de 3 à 4 mm de l'encombrement des incisives inférieures dans la population traitée. 

Une arcade linguale passive avec élimination sélective des dents primaires a fourni un espace et un guidage d'éruption adéquats pour soulager un encombrement important des incisives inférieures chez 105 des 107 individus.

Brennan et Gianelly4 ont quantifié les changements dimensionnels chez 107 patients à dentition mixte traités avec des arcs linguaux passifs jusqu'à l'éruption de toutes les dents successives, l'extraction occasionnelle des secondes molaires primaires étant la seule autre intervention. La longueur de l'arc a diminué en moyenne de 0,4 mm, tandis que la largeur a légèrement augmenté chez les patients avec arc lingual. La moyenne de +4,4 mm d'espace total disponible a entraîné une diminution moyenne de l'encombrement des incisives inférieures, passant de -4,8 mm avant traitement à +0,2 mm après traitement. Les ajustements d'espace ont été suffisants pour résoudre complètement l'encombrement des incisives chez 65 personnes (environ 60 %). Chez 16 autres personnes (1 sur 6), l'écart final était inférieur à 1 mm, chez 13 personnes  (1 sur 10), il était inférieur à 1 mm, et chez 13 autres personnes (1 sur 10), on dénotait une discordance finale inférieure à 2 mm. 

Seuls 14 patients (13 %) présentaient un encombrement supérieur à 2 mm après l'éruption complète du segment postérieur. Il convient de noter que la majorité des patients présentant des niveaux plus élevés d'encombrement de l'arcade post arc lingual présentait également une perte ectopique initiale des canines primaires inférieures. En résumé, le port d’un arc lingual passif avec élimination sélective des dents primaires a fourni un espace et un guidage d'éruption adéquats pour soulager un encombrement important des incisives inférieures chez 105 des 107 individus.

Ces études ont confirmé de manière cohérente que la longueur de l'arc reste relativement constante ou diminue peu chez les patients traités avec un arc lingual passif en réduisant le mouvement vers l'avant des molaires et le mouvement lingual des incisives inférieures. Un traitement en temps opportun permet non seulement de maintenir la longueur de l'arcade, mais aussi de positionner les canines et les prémolaires en éruption distale, ce qui a une influence positive sur le soulagement de l'encombrement des dents mixtes dans une fourchette de 2 à 4 mm, ce qui est suffisant pour soulager l'encombrement des dents inférieures chez environ deux tiers à trois quarts des patients.

Le port d’un arc lingual passif avec élimination sélective des dents primaires a fourni un espace et un guidage d'éruption adéquats pour soulager un encombrement important des incisives inférieures chez 105 des 107 individus.


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Denis Massé 

Cet article est une traduction libre de l'article original de Jeffrey A. Dean, tiré de McDonald and Avery's Dentistry for the Child and Adolescent (10e édition), 2016 par Denis Massé.


Références :

J. DeBaets, M. Chiarini, The pseudo Class I: a newly defined type of malocclusion; J Clin Orthod. 1995; 29: 73-87.

Dugoni, Lee, Valera, and Dugoni 1995, Lingual and Palatal Arches,https://pocketdentistry.com/6-lingual-and-palatal-arches/.

J. Rebellato Lower arch perimeter preservation using the lingual arch; Am J Orthod Dentofacial Orthop, 1997 Oct;112(4):449-56.

M. M. BrennanA. A. Gianelly, The use of the lingual arch in the mixed dentition to resolve incisor crowding; Am J Orthod Dentofacial Orthop. 2000 Jan;117(1):81-5.




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